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Ce qu’il faut retenir de 2020 en Afrique

Pandémie, coup d’Etat, élections, crise économique, terrorisme… « Le Monde Afrique » a sélectionné cinq événements qui ont marqué l’année sur le continent.

  • Une pandémie qui a terrassé l’économie
Des voyageurs attendent leurs résultats après avoir été testés pour le Covid-19 dans une clinique mobile à une station de taxis de la gare principale de Johannesburg, en Afrique du Sud, le 24 décembre 2020. Denis Farrell / AP

Comme toutes les régions du globe, l’Afrique a été rattrapée par la pandémie de Covid-19, apparue pour la première fois sur le continent en Egypte, le 14 février. A l’instar de ce qui a été mis en place ailleurs dans le monde, de nombreux pays africains ont décrété des confinements et fermé leurs frontières dès avant l’arrivée de la première vague pour lutter contre la propagation du virus. L’épidémie a pourtant semblé jouer en Afrique une partition différente avec un nombre de contaminations relativement contenu.

Tous ensemble, les cinquante-quatre pays du continent recensaient officiellement moins de 65 000 morts à la fin décembre, à peu près autant que la France et moins que le Royaume-Uni ou l’Italie. De grandes personnalités africaines ont toutefois été emportées par le Covid-19. Dans le monde de la politique avec les anciens présidents ghanéen Jerry Rawlings et burundais Pierre Buyoya ou l’opposant malien Soumaïla Cissé ; dans celui des arts avec le saxophoniste camerounais Manu Dibango, le chanteur algérien Hamdi Benani ; ou celui des sports avec l’ancien président sénégalais de l’Olympique de Marseille Pape Diouf, pour ne citer qu’eux.

En fin d’année, l’épidémie a semblé s’accélérer nettement dans certains pays du continent, comme le Mali ou le Kenya, laissant redouter une seconde vague plus redoutable que la première. Mais, surtout, le virus a occasionné des dommages économiques considérables. En 2020, l’Afrique subsaharienne devrait enregistrer sa première récession depuis vingt-cinq ans. Selon le Fonds monétaire international (FMI), sa croissance devrait chuter de 3 %. Et le revenu par tête devrait retomber à son niveau de 2013, soit sept ans de progrès effacés en quelques mois.

  • Un coup d’Etat au Mali
Le colonel Assimi Goïta, chef de la junte qui a renversé l’ex-président malien Ibrahim Boubacar Keïta, arrive pour rencontrer une délégation de la Communauté des Etats d’Afrique de l’Ouest (Cédéao), au ministère de la défense à Bamako, le 22 août 2020. AP

Le 18 août, le Mali a été le théâtre d’un quatrième coup d’Etat depuis son indépendance en 1960. Au pouvoir depuis 2013, l’ancien président Ibrahim Boubacar Keïta, surnommé « IBK », a été renversé par un quintet de colonels conduit par le très secret Assimi Goïta. Une chute survenue alors que le pays était en proie à une profonde crise sociopolitique depuis le début de l’été. A l’appel d’une coalition hétéroclite d’opposants (le M5-RFP) et de l’imam wahabite Mahmoud Dicko, les manifestations se multipliaient à Bamako pour réclamer la démission d’IBK, dont certaines sévèrement réprimées (18 morts et 150 blessés les 10 et 11 juillet).

Ce putsch a surtout été le résultat de la lente et inexorable dégradation de la situation sécuritaire, économique et sociale dans ce pays sahélien. Depuis son arrivée au pouvoir, le président Keïta n’est jamais parvenu à restaurer l’autorité de l’Etat sur le territoire malien. Le nord et désormais le centre sont sous la coupe de djihadistes et groupes armés, et les affrontements intercommunautaires se multiplient. Les élections législatives de mars et avril ont servi de détonateur à la contestation, alors que l’opposition n’a cessé de dénoncer des résultats frauduleux.

La junte qui a renversé IBK a fini par nommer l’ancien colonel et ministre de la défense Bah N’Daw, 70 ans, comme président d’une transition censée durer dix-huit mois, jusqu’à l’organisation de nouvelles élections.

  • Des élections en pagaille
Le président ivoirien Alassane Ouattara quitte le palais présidentiel après avoir prêté serment pour son troisième mandat de président à Abidjan, en Côte d’Ivoire, le 14 décembre 2020. Le chef de l’Etat sortant a obtenu 94,3 % des voix au terme d’un scrutin contesté. Diomande Ble Blonde / AP

Du Togo au Ghana, du Burkina Faso à la Centrafrique, une flopée de scrutins a rythmé l’année 2020. Des processus électoraux dont certains ont donné l’impression d’une démocratisation en péril, en Afrique de l’Ouest notamment. Ce fut particulièrement le cas en Guinée et en Côte d’Ivoire où des arrangements constitutionnels ont permis à des présidents vieillissants, en l’occurrence Alpha Condé (82 ans) et Alassane Ouattara (78 ans), de briguer et de remporter en octobre un troisième mandat contesté.

En Côte d’Ivoire, le chef de l’Etat avait pourtant d’abord assuré qu’il ne se représenterait pas afin de céder le pouvoir à la « jeune génération ». Mais la disparition brutale, en juillet, de son dauphin désigné, le premier ministre Amadou Gon Coulibaly, l’a fait changer d’avis. Alassane Ouattara a finalement été réélu dès le premier tour avec un score massif (94 %), au terme d’un scrutin boycotté par l’opposition et qui laisse après lui un pays fracturé.

Au Burkina Faso (22 novembre) et au Niger (27 décembre), les élections ont eu lieu sous la menace de groupes djihadistes mais se sont déroulées dans un cadre politique relativement pacifié. En Centrafrique en revanche (27 décembre), le double scrutin présidentiel et législatif a ravivé la crise dans laquelle s’enfonce le pays depuis 2013. Fédérées autour l’ancien président François Bozizé, exclu de la course à la magistrature suprême, de puissantes milices ont empêché le vote dans plusieurs villes de province.

  • Un conflit meurtrier dans la province éthiopienne du Tigré
Un enfant assis devant un monument improvisé avec le drapeau impérial éthiopien sur un rond-point à Alamata, dans la province éthiopienne du Tigré, le 8 décembre 2020. EDUARDO SOTERAS / AFP

Début novembre, les tensions latentes entre le gouvernement fédéral d’Addis-Abeba et le Front populaire de libération du Tigré (FLPT), le parti à la tête de la région du Tigré, ont dégénéré en conflit armé. Le 4 novembre, le premier ministre Abiy Ahmed a lancé une offensive militaire contre cette province de 5 millions d’habitants dont les représentants ont déclaré leur dissidence. La région est depuis sous blocus militaire et humanitaire. Le bilan des morts est difficile à établir, du fait de la coupure des moyens de télécommunication. Mais plus de 50 000 personnes se sont déjà réfugiées au Soudan pour fuir les combats et l’ONU dit craindre de graves crimes de guerre.

Ce conflit meurtrier a fait ressurgir les peurs de dislocation de ce pays de 110 millions d’habitants – le deuxième plus peuplé d’Afrique. Divisée en dix régions semi-autonomes pour respecter les particularités ethniques de ses habitants, l’Ethiopie était déjà en proie depuis plusieurs mois à des violences intercommunautaires, notamment en provenance de l’ethnie majoritaire oromo à laquelle appartient le premier ministre. La guerre au Tigré menace désormais de déborder dans les provinces voisines et bouleverse déjà les pays de la région. Un étrange revirement du destin pour Abiy Ahmed, couronné du prix Nobel de la paix en 2019 pour son rapprochement avec le voisin érythréen.

  • ONG et écoles prises pour cibles
Près de Niamey, dans la réserve de Kouré après l’assassinat de six travailleurs humanitaires français de l’ONG Acted, de leur chauffeur et de leur guide nigériens, le 9 août 2020. BOUREIMA HAMA / AFP

Mozambique, Sahel, Nigeria… l’activité de groupes djihadistes d’obédiences diverses a augmenté en intensité sur de multiples parties du continent. Dans le nord du Mozambique par exemple, l’insurrection islamiste des Chabab a connu une véritable percée. Plus de 500 000 personnes ont déjà fui les violences dans cette région riche en ressources gazières, selon le gouvernement mozambicain. La spirale d’insécurité s’est aussi accentuée au Sahel et en Afrique centrale, entretenue par des groupes tels que celui qui a détenu dans le nord du Mali l’opposant malien Soumaïla Cissé et l’humanitaire française Sophie Pétronin, libérés début octobre contre plusieurs centaines de djihadistes.

Les humanitaires ont d’ailleurs été régulièrement pris pour cible en 2020, comme l’a rappelé l’assassinat en août au Niger de six employés français de l’ONG Acted, de leur chauffeur et leur guide nigériens dans une attaque revendiquée par l’organisation Etat islamique. Les employés de ces organisations internationales ont été aussi fréquemment visés dans le nord du Nigeria, à la fois par la secte islamiste Boko Haram, et sa branche dissidente nommée l’Iswap (Etat islamique en Afrique de l’Ouest).

Les écoles ont constitué une autre cible de choix des groupes armés et djihadistes. La Coalition mondiale pour la protection de l’éducation contre les attaques (GCPEA) a recensé plus de 85 attaques contre des écoles et des collèges au Sahel entre janvier et juillet. En mai par exemple, deux écoles primaires ont été brûlées dans l’est du Burkina Faso et au Niger. Au Cameroun anglophone, l’éducation a aussi été la victime collatérale du conflit qui oppose le gouvernement aux séparatistes. Fin octobre, sept élèves ont ainsi été tués par des hommes armés dans leur salle de classe à Kumba (Sud-Ouest).

Au Nigeria enfin, plusieurs centaines de collégiens et lycéens ont été enlevées le 11 décembre lors d’un kidnapping de masse revendiqué par Boko Haram. La majorité a été libérée quelques jours plus tard, mais certains seraient encore retenus en captivité.

Lemonde/Inès Derbak

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