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Rescapé de Soronkoni, MCD raconte : « comment nous étions détenus… »

CONAKRY- Certains rescapés du camp de Soronkoni ont décidé de briser le silence après leur libération. MCD, âgé de 52 ans a passé 47 jours en détention à Soronkoni, un camp militaire situé à plus de 600 kilomètres de la capitale Conakry. Ce boulanger de profession a été arrêté à Kaloum avec d’autres personnes. Il fait partie d’un groupe de 43 personnes arrêtées à Conakry, puis conduites nuitamment à Kankan. Ils ont passé un mois deux semaines en prison. Il a été libéré ce samedi 28 mars 2020. Au Milieu des siens, il revient sur les circonstances de son arrestation et de son séjour à Soronkoni. Récit !!!

« J’ai passé 47 jours de détention avec d’autres personnes. Le groupe avec lequel j’ai été mis aux arrêts, nous avons fait un mois deux semaines derrière les barreaux à Soronkoni. On m’a arrêté à Kaloum où je travaille. J’étais parti récupérer de l’argent avec un client vers chez Bobodi. C’était à 23 heures. Vous savez, le travail de pain c’est la nuit le plus souvent. C’est la routine pour moi. Comme toujours, il n’y a pas de problème à Kaloum. Vous pouvez circuler toute la nuit sans aucun risque parce que le calme est là.

 J’ai pris l’argent avec mon client, après j’ai décidé de retourner à ma boulangerie. C’est là que les pick-up ont garé devant moi. Je n’étais pas seul dans les parages. J’ai été ramassé avec d’autres personnes. La nuit de notre arrestation, nous l’avons passée au camp Makambo. Le lendemain tôt le matin, on nous a transférés dans une unité de police à Cameroun. 

Nous sommes restés à Cameroun jusqu’à 22 heures. Ensuite, ils sont venus nous embarquer dans des véhicules. Arrivés dans la haute banlieue, ils ont rajouté d’autres personnes arrêtées. En tout, nous étions 40 à être dans les véhicules. On pensait qu’on allait nous déposer dans un autre service à Conakry ici. Au fur et à mesure que nous avancions, nous avons vu que nous dépassions Km 36 ensuite Coyah. Comme, c’était la nuit on avait les visages démasqués, certains étaient couchés, d’autres assis. 

A Kindia ils ont marqué un arrêt. Pour nous c’était la destination finale. Je ne sais pas quelle heure il faisait mais la ville était calme déjà, c’était tard la nuit. Quelques temps après, on a pris la route de Mamou. Là également on pensait que c’était la destination finale. C’est là que certains d’entre nous ont pu parler à l’un des pompistes de notre cas. Nous avons demandé à la personne de voir dans quelle mesure il va prendre une photo de nous et publier afin que les gens sachent ce qui nous est arrivé. Nous avons dit à l’intéressé que nous sommes mis aux arrêts à Conakry sans savoir pourquoi et on nous envoie vers une destination inconnue, et nous avons besoin que l’opinion soit informée de notre sort.

Je précise qu’à Conakry ils nous ont juste demandé de décliner notre identité, mais ils ne nous ont pas dit de quoi nous sommes reprochés. Par exemple, on nous avait demandé si nous avons fait le service militaire ? Est-ce que nous sommes membres du FNDC ? Pour quel parti politique nous militons ? Ce sont les questions demandées. 

Pour moi j’ai répondu que tout ça ne m’intéresse pas, ma préoccupation c’est comment faire vivre ma famille, c’est pourquoi je travaille tard la nuit quand tout le monde dort. Je leur ai expliqué que je travaille la nuit, c’est dans ces circonstances que j’ai été arrêté. Ils ont tout noté.   

A Dabola, la personne dont je vous parlais a pu prendre nos photos et publier sans que les agents ne le sachent. Nous avons continué le trajet. A 15 heures on a constaté que nous sommes à Kankan. De là, on a pris la Direction de Soronkoni. Dès notre arrivée, un médecin militaire nous a signifié qu’il a vu nos photos sur les réseaux sociaux. Après ils ont pris nos noms avant de nous jeter en prison. Ils ont dit qu’ils ne veulent pas de parole et que nous devons les  écouter.

Nous sommes restés pendant 47 jours en détention. Quand tu veux te mettre à l’aise tu fais signe on te sort pour le faire après on te retourne en prison. Parfois aussi on te sort pour te poser les mêmes questions déjà posées à Conakry. C’était la routine, jusqu’à ce vendredi 27 Mars 2020, le Colonel est venu nous dire qu’il y a 4 personnes dans notre groupe de 40 qui sont suspects à leurs yeux. Ils sont venus extirper   les 4 entre nous.  Après ils nous ont signifié à nous autres que nous sommes libres désormais. 

Le Colonel a dit qu’ils n’ont rien constaté de mal en nous ou dans nos attitudes. Donc on peut se préparer pour rentrer chez nous. Dans la salle où on était, nous avons trouvé d’autres, je pense en tout nous étions au nombre de 53 dedans. Tôt, samedi matin 28 mars, ils ont envoyé un camion pour nous embarquer, direction Conakry. Ils nous ont déposé dans une unité à Kagbelen. Ils ont donné le transport à chacun de nous, selon la distance qui vous sépare de votre quartier ou domicile.  

Pour être clair, durant tout notre séjour carcéral, nous n’avons pas été torturé, ni bastonné. Juste nous avons souffert un peu avec la nourriture (…). Sinon le reste nous n’avons pas été torturés. Je ne sais pas pour d’autres, mais là où  nous étions détenus, personne n’a été mis à rude épreuve.

Mais nos familles ont souffert derrière nous parce qu’elles ne savaient pas où on était durant tout ce temps. Pour mon cas pendant mes 47 jours de détention, c’est au 44eme jour que j’ai pu communiquer avec ma famille pour leur dire où est-ce que j’étais. Ils étaient devenus presque fous sans mes nouvelles à Conakry et au village. Dieu merci aujourd’hui je retrouve ma famille, je suis bien portant ». 

Alpha Ousmane Bah (AOB)

Pour Africaguinee.com

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