Moussa Dadis Camara à Conakry, le 30 septembre 2009-AFP-Seyllou Diallo
Moussa Dadis Camara, au pouvoir entre 2008 et 2010, était emprisonné depuis septembre 2022, date du début du procès sur le massacre du 28 septembre 2009, qui avait fait plus de 150 morts.
Plusieurs hommes armés ont pris d’assaut la principale prison de Conakry, en Guinée, samedi 4 novembre, et ont libéré l’ancien dictateur guinéen Moussa Dadis Camara, a fait savoir le ministre de la justice, Alphonse Charles Wright, qui a également annoncé la fermeture des frontières. Deux ou trois autres anciens responsables actuellement jugés comme lui pour un massacre perpétré en 2009 sous sa présidence ont également été extraits de la prison, selon un ministère et des avocats, sans qu’apparaisse clairement si Moussa Dadis Camara s’était échappé de son plein gré. L’un d’eux a été repris.
L’assaut du commando a réveillé, avant l’aube, le centre de la capitale au son des armes automatiques. « Il était environ 5 heures du matin. Des hommes lourdement armés ont fait irruption à la maison centrale de Conakry », a dit Alphonse Charles Wright. « Ils ont réussi à partir avec quatre accusés dans le procès des événements du 28 septembre [2009], notamment le capitaine Moussa Dadis Camara », a-t-il complété « Je dis au peuple de Guinée qu’ils seront retrouvés partout où ils seront », a-t-il déclaré. « Nous les retrouverons. Et les responsables devront répondre de leurs actes », a affirmé M. Wright à la radio locale FIM FM.
« Le procureur général m’a confirmé que mon client avait été sorti de prison par des hommes lourdement armés », a confirmé à l’Agence France-Presse (AFP) son avocat, Jocamey Haba. « Je continue de penser qu’il a été enlevé. Il a confiance en la justice de son pays, c’est pourquoi il ne va jamais tenter de s’évader », a-t-il ajouté en faisant référence au procès en cours. « Sa vie est en danger », a-t-il assuré. Depuis le 28 septembre 2022 se tenait en Guinée le procès de l’ancien dictateur, au pouvoir entre décembre 2008 et janvier 2010. Il était détenu dans le centre de la capitale depuis le début des audiences.
Au moins 156 morts le 28 septembre 2009
Le capitaine Camara et une dizaine d’anciens responsables militaires et gouvernementaux y répondent d’une série de meurtres, actes de torture, viols et autres enlèvements commis le 28 septembre 2009 par les forces de sécurité au stade du 28-Septembre dans la banlieue de Conakry, où s’étaient réunis des dizaines de milliers de sympathisants de l’opposition, et aux alentours. Au moins 156 personnes y ont été tuées et des centaines blessées, et au moins 109 femmes violées, selon le rapport d’une commission d’enquête mandatée par l’ONU.
L’annonce de l’évasion de Moussa Dadis Camara est intervenue quelques heures après que des tirs nourris ont éclaté dans la capitale guinéenne, tôt, samedi matin. Plusieurs témoins ont rapporté que les rues étaient désertes et que des blindés avaient été déployés. « Le centre-ville est bloqué depuis l’aube, pas d’entrée ni de sortie », a déclaré un commerçant à l’AFP. « Il y a des tirs d’armes automatiques et de guerre dans le quartier politico-administratif de Kaloum », a affirmé un autre habitant.
Kaloum, situé sur une péninsule, est le siège de la présidence, du gouvernement, des institutions, du quartier général de l’armée mais aussi de la prison centrale. Certains témoignages ont localisé les tirs près de la prison mais aussi du pont du 8-Novembre, nœud routier crucial pour entrer et sortir du centre.
Le Monde avec AP et AFP